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Inf’OGM / L’agriculture biologique au cœur du combat d’un eurodéputé

L’agriculture biologique peut et doit nourrir le monde Un impératif de santé et de protection environnementale incompatible avec l’usage des OGM, dangereux et avant tout au service des multinationales. Dans cet entretien avec Inf’OGM, veille citoyenne sur les OGM je développe en détail ma vision des OGM et de l’agriculture biologique.

Inf’OGM – Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs les différences fondamentales, paradigmatiques, entre l’agriculture biologique et l’agriculture transgénique (l’agriculture qui utilise des OGM) ?
Claude Gruffat –
L’agriculture biologique est un système de production agricole et alimentaire qui travaille selon les règles de base de l’agronomie, de la vie du sol, de la rotation des cultures, d’un assolement long et de la polyculture-élevage. C’est un véritable travail avec la nature, les cycles naturels, et pas contre elle.
L’agriculture biologique respecte les cycles du vivant et refuse le « dopage » par les pesticides ou les engrais chimiques, qui nourrissent la plante, alors que la Bio nourrit le sol, qui à son tour nourrit la plante.
Le paysan est plus autonome dans ses pratiques. Il utilise moins d’intrants et dépend beaucoup moins des firmes multinationales, des firmes agroalimentaires et de leurs intérêts financiers. La Bio combine les meilleures pratiques en matière d’environnement, de préservation des ressources naturelles, d’action en faveur du climat, de la biodiversité et du bien-être animal. Grâce à des normes de production élevées, elle permet aussi de fournir une alimentation de qualité favorable à la santé. Elle offre un vrai choix d’alimentation au consommateur.

De son côté, l’agriculture transgénique recourt abondamment à la chimie et aux technologies de manipulation génétique pour améliorer ses performances de production, « quoiqu’il en coûte » à l’environnement, à la qualité des biens communs (eau, air, fertilité des sols, biodiversité, climat, etc.). Ses techniques d’ingénierie génétique aggravent les conséquences négatives de l’agriculture intensive sur l’environnement et sur tout le vivant, jusque sur les êtres humains. Ses applications concernent l’agriculture, au travers des cultures et des animaux d’élevage, mais ont aussi des implications sur toutes les espèces sauvages du fait de leur dissémination dans l’ensemble de la nature. Cette forme d’agriculture empêche le consommateur d’acheter des produits sans OGM et place la nature et notre alimentation entre les mains des firmes multinationales faisant peu de cas de la santé, de l’environnement et du devenir des paysans. Avec ce modèle, les paysans perdent toute leur autonomie de production de matières premières alimentaires et les territoires leur souveraineté alimentaire. Nous le vivons cruellement avec la guerre en Ukraine.

Récemment, le patron de Syngenta, Eric Eyrwald, a déclaré dans un journal suisse : « selon le produit, les rendements de l’agriculture biologique peuvent être jusqu’à 50 % inférieurs. La conséquence indirecte est que les Africains meurent de faim parce que nous mangeons de plus en plus de produits bio. »
Les propos du patron américain de Syngenta sont excessifs jusqu’à la stupidité, et ce qui est excessif est insignifiant.
Concernant la première partie de sa déclaration, on peut certes observer selon les productions, un niveau de rendements différent entre l’agriculture conventionnelle et l’agriculture biologique. Mais, avec le temps, ceux-ci tendent à se réduire. Si l’agriculture biologique avait, dans le passé, bénéficié d’autant de moyens de recherche et de soutien des politiques publiques que l’agriculture conventionnelle, ces écarts seraient certainement moindres. On observe par ailleurs une stagnation des rendements de l’agriculture conventionnelle depuis plusieurs années, sans toujours s’interroger sur ses effets et l’impact des nouvelles technologies sur la dégradation des ressources naturelles, et en particulier des sols.

Mais la recherche de rendements les plus élevés possibles, comme nous l’avons fait depuis plus de 50 ans dans les pays riches, ne garantit pas que le reste du monde soit épargné de la famine et que nos paysans vivent mieux. Malgré les records de production mondiaux et un niveau de ressources suffisant pour nourrir le monde, nous comptons toujours un milliard d’habitants qui ne mangent pas à leur faim sur terre et deux autres milliards qui souffrent de malnutrition. Les Africains parviendront à mieux s’alimenter en aidant leurs millions de paysans pauvres à se développer à partir de cultures vivrières et des pratiques agro-écologiques leur donnant la capacité d’alimenter leurs propres populations. Il y a également urgence à remettre en cause le modèle agricole européen dans son soutien excessif aux exportations, qui nuisent clairement au développement des cultures locales dans beaucoup de pays du Sud.

Actuellement, plusieurs syndicats (dont la FNSEA), l’ancien ministre de l’agriculture Julien Denormandie, des entreprises… tentent de réduire les objectifs (notamment la baisse des pesticides) de la stratégie européenne « Farm to Fork » (« De la ferme à la table ») et justifie ce lobbying avec la guerre en Ukraine. Ils déploient une stratégie de la peur (crise alimentaire, famine) pour favoriser une agriculture industrielle. Comment réagissez-vous à ces propositions ?
La réaction primaire consistant à dire qu’il faut produire plus en mobilisant les surfaces en jachères en cours est un non-sens. Pourquoi ? Ces surfaces ne représentent que 2,6 % des surfaces cultivables. Leur remise en culture permettrait de produire 0,4 % de volumes supplémentaires, ces superficies étant généralement des terres marginales et peu productives, des quantités bien insuffisantes vis-à-vis des importants volumes de production pris dans le blocus de la guerre en Ukraine. Elle détruirait au contraire des zones de biodiversité ayant été maintenues depuis des années au moyen d’argent public. C’est une erreur historique face aux enjeux de biodiversité

La FNSEA et l’ancien ministre de l’agriculture, Julien Denormandie, c’était bonnet blanc et blanc bonnet, et plus encore à l’approche des présidentielles.
Déjà en 2020, et donc bien avant la guerre en Ukraine, ils ont contesté la stratégie « De la ferme à la table », dont la question centrale sur les pesticides, et ont supporté une soit disant réforme de la PAC qui n’apportera absolument aucun changement pour les années à venir. La guerre en Ukraine est pour eux un nouveau prétexte pour que rien ne bouge et pour même augmenter la production au risque de compromettre la stratégie de la ferme à la table, la lutte contre le réchauffement climatique, la préservation de l’environnement, conditions indispensables pour la garantie de notre sécurité alimentaire à moyen et long termes. Cela est totalement inacceptable et pas très honnête. Il existe, tout d’abord, suffisamment de nourriture en Europe et dans le monde sans qu’il soit nécessaire d’augmenter les volumes de production. De son côté, l’Union dispose de bien d’autres moyens de venir en aide aux pays les plus vulnérables et très dépendants du blé de la Mer Noire qui se voient privés d’approvisionnements alimentaires en raison de la guerre. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 19 % de ses surfaces agricoles cultivées seulement sont destinées à l’alimentation humaine des européens. Presque autant sont exportées. Parmi le reste des surfaces, 54 % sont utilisées pour l’alimentation animale et presque 10 % dans l’industrie, dont la production d’agro-carburants et de biogaz. L’Union pourrait très bien réduire la part de ses 54 % de production céréalière qui servent à l’alimentation animale et réduire légèrement sa consommation de viande, voire suspendre temporairement la part de ses surfaces en grandes cultures utilisées à la production d’agro-carburants. Elle doit aussi promouvoir une autre politique de développement avec les pays du Sud, leur permettant de mieux assurer leur propre sécurité alimentaire, notamment en les aidant à développer leurs propres productions en Bio pour leur propre souveraineté.

Quelles sont les grandes conditions pour que l’agriculture bio nourrisse l’ensemble de la population mondiale ?
Il est bien sûr possible que l’agriculture biologique nourrisse l’ensemble du monde, à condition de réduire partout le gaspillage alimentaire et de limiter la consommation de produits d’origine animale. L’Union européenne pourrait donner un signal fort en réorientant la Politique Agricole Commune (PAC) en ce sens, notamment en lui ajoutant une approche alimentaire, inexistante aujourd’hui.
Dans le même sens, l’agriculture du monde est composée de 30 millions de paysans équipés de tracteurs et recourant à la chimie, de 300 autres millions utilisant le cheval et le fumier et de 1,2 milliard – soit la grande majorité – travaillant à la houe. Ces derniers produisent en moyenne 3 équivalents quintaux / ha. En les accompagnant par une formation à l’agrobiologie, ils passeraient facilement de 3 à 6 équivalents quintaux / ha. Ce rendement supplémentaire fournirait plus de 3 milliards d’équivalents quintaux supplémentaires, soit bien assez pour répondre au défi de la faim dans le monde.
Ceci confirme que la solution aux besoins alimentaires mondiaux passe bien plus par une légère augmentation des rendements sur de grandes surfaces plutôt qu’une élévation des rendements sur peu de surfaces et tout en polluant. Il convient donc de traiter le problème avec un regard exactement inverse à celui posé par l’agro-industrie occidentale.

Pensez-vous qu’une coexistence des filières OGM et bio est possible ?
L’agriculture se pratique dans un milieu ouvert et la culture des OGM occasionne une dissémination de gènes dans la nature. Les mesures d’isolement des parcelles en culture d’OGM n’empêcheront pas une contamination des cultures voisines ou des espèces sauvages situées dans les zones adjacentes…

Suite et article complet à retrouver sur le site d’Inf’OGM

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