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La justice sociale fait une entrée modeste dans la transition énergétique en Europe

Aujourd’hui nous avons voté la position du Parlement européen sur la première partie du paquet Fit for 55 qui doit emmener les émissions européennes de gaz à effet de serre vers une baisse d’au moins 55% d’ici 2030. Grande nouveauté, la création d’un fonds social (SCF – Social Climate Fund) destiné à accompagner les personnes les plus impactées économiquement par les efforts nécessaires. Un dispositif dont la création est à saluer – car ce n’est pas aux plus précaires de payer le coût de la transition – malgré des moyens encore trop limités.

Les ménages précaires : moins responsables mais victimes principales du dérèglement climatique

Transports, précarité énergétique, pouvoir d’achat… Alors qu’ils sont moins émetteurs de CO2, les ménages les plus précaires sont malheureusement les plus exposés aux conséquences du changement climatique. Ils sont également ceux qui, proportionnellement, risquent d’être les plus impactés financièrement par les mesures nécessaires pour tendre vers une neutralité carbone européenne à l’horizon 2050.

Les Gilets Jaunes français étaient l’expression d’une partie de la population française qui mesurait parfaitement cette injustice. Une réaction maladroite voire violente parfois mais pas sans fondement. En effet, la transition va coûter cher et, parmi les textes qui composent le paquet Fitfor55, une grande partie va venir augmenter encore le coût des services et produits du quotidien. Sans mécanisme de compensation, les plus bas revenus ne pourront pas suivre ces conséquences.

Fitfor55, c’est ce paquet climat européen, composé de 14 textes, dont 8 ont donc, à ce stade, été votés par le Parlement européen, et qui aura un impact majeur sur le quotidien des européen.ne.s. Il comprend, entre autres, la révision du système d’échange de quotas d’émission de l’Union et des taxes sur les énergies pour en finir notamment avec les exemptions scandaleuses notamment pour le kérosène de l’aviation et le transport maritime. Il inclut également la création d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) pour faire payer le prix du carbone aux produits importés. Plus emblématique, il entérine la révision des normes de CO2 pour que les nouvelles voitures vendues en 2035 ne puissent plus émettre de CO2.

Une adaptation aux enjeux climatique profonde mais qui intègre enfin une approche sociale

L’ensemble de ces textes va donc dessiner la trajectoire climatique de l’industrie et des marchés européens. Mais la transition énergétique ne sera acceptée et ne fonctionnera que si elle est socialement juste. C’est pourquoi je me réjouis que dans le paquet Fitfor55 soit enfin créé un fond social servant à organiser la redistribution. Il servira à soutenir les ménages les plus exposés et les microentreprises les plus vulnérables et à lutter contre la pauvreté énergétique par la réduction de taxes sur l’énergie et d’autres types d’aides directes.

Concrètement, l’objectif est donc d’atténuer les effets du nouveau marché carbone (ETS 2) qui couvrira les secteurs du transport routier et du chauffage des bâtiments, dès 2026. Sans contre mesures, ce dernier aurait en effet menacé gravement le pouvoir d’achat des ménages, des micro-entreprises et des utilisateurs de transports vulnérables. Inenvisageable, surtout dans le contexte actuel de hausse des prix de l’énergie. 100% des revenus de l’ETS2 serviront d’ailleurs à abonder le Fonds Social. L’estimation du budget tourne autour de 10 milliards d’euros/an. Une somme importante dans l’absolu mais insuffisante au regard des enjeux. Il faudra impérativement l’augmenter par d’autres moyens.

Parmi les avancées obtenues dans le Fonds Social :

  • Le fonds est destiné aux ménages précaires, aux usagers vulnérables des transports et aux micro entreprises fragiles, en particulier ceux qui sont en situation de pauvreté énergétique ou de mobilité.
  • Les microentreprises vulnérables qui sont touchées de manière significative par l’ETS 2 restent éligibles pour un soutien, tandis que les PME sont maintenues hors du champ d’application du Fonds, bénéficiant d’aides spécifiques par ailleurs.
  • Pour la première fois, une définition européenne de la pauvreté énergétique et de la pauvreté liée à la mobilité est intégrée dans le droit communautaire.
  • Les plans d’action sociaux et climatiques des États membres seront adoptés conformément au code de conduite de l’UE en matière de partenariat, c’est-à-dire que tous les acteurs, y compris les ONGs, doivent être impliqués.
  • Une véritable approche de genre : le rapport reconnaît que les femmes sont plus touchées par la précarité énergétique en Europe et en particulier les mères célibataires. Le rapport enjoint les États membres et la Commission à évaluer cette problématique et à proposer des solutions dédiées.
  • L’appel des écologistes à de nouveaux investissements dans les mesures d’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, les pompes à chaleur et les communautés d’énergie renouvelable, qui constituent la méthode la plus rentable pour réduire la dépendance aux importations, a été massivement soutenu !

Si la création de ce Fonds Social est une bonne nouvelle, nous ne nous en satisfaisons pas. Les sommes mobilisées restent faibles au vu des changements à venir. Mais le plus compliqué était de le faire exister. Nous restons mobilisés pour le faire évoluer ou lui adjoindre d’autres dispositifs à destination des plus précaires. La transition énergétique est indispensable, il est essentiel qu’elle soit juste pour toutes et tous.


 

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